Tisserand de la compréhension du devenir
Conférencier, expert et auteur

Vers l'émergence du nouveau paradigme.

Vivre autrement, maintenant, sans plus écouter ni les "maîtres", ni les "victimes" des mondes et paradigmes révolus.

Le nouveau paradigme qui vient, est une émergence et, en tant qu'émergence, il ne se contrôle pas, il ne se pilote pas, il ne se gouverne pas. Et cela agace tant ceux qui croient détenir un (le) pouvoir puisqu'il leur échappe totalement, que ceux qui voudraient qu'il n'émerge point puisqu'il dérange leurs habitudes, leurs références et valeurs, ou leurs projets.

L'émergence du nouveau paradigme a donc deux familles d'ennemi : ceux qui se croient les maîtres et ceux qui se prétendent les victimes.

Ce qu'il faut bien comprendre, ce sont les raisons et les conditions d'une telle émergence. Toute émergence d'un inédit est une réponse globale (holistique) à une accumulation de tensions que le système antérieur ne parvient plus à dissiper. Ces tensions naissent de l'inadéquation accélérée de cet ancien système par rapport à son milieu et aux systèmes connexes. Autrement dit, pour des raisons structurelles et profondes, l'ancien système est devenu obsolète et n'a que deux stratégies possibles : ou bien l'émergence d'un nouveau système radicalement autre que lui, ou bien la mort.

J'ai montré ailleurs, les cinq grandes sources de ces tensions : écologique, axiologique, généalogique, téléologique et métabolique c'est-à-dire, plus concrètement, les pénuries matérielles, l'inefficience des organisations pyramidales, l'impasse financiaro-industrielle, le nihilisme spirituel et les technologies numériques).

Ces cinq ruptures sont irréversibles (au grand dam des idéologues, de gauche comme de droite, du "monde d'avant") : inutile de pleurnicher, inutile de s'aveugler, inutile de tricher.

Il faut en faire son deuil et passer par les cinq stades mis en évidence par Elisabeth Kübler-Ross : le déni (des politiques et des "modernistes", en général), la colère (des "gilets jaunes" et autres …) et la culpabilisation (des "rétros" qui conspuent les mâles, les blancs, les hétéros, les riches, les laïques, …), l'atermoiement (des Davos, Rio, Kyoto, …),  la désespérance (des no future, des suicidaires, des drogués de tous genres, …) , avant que l'on arrive enfin au temps de la sublimation c'est-à-dire de l'assomption du nouveau paradigme (si ces ennemis ne le tuent pas dans l'œuf, tuant du même coup toute l'humanité).

Revenons à cette idée que, pour le nouveau paradigme, il n'y a plus ni "maîtres", ni "victimes" puisque ces deux notions convoquent des critères et des références qui relèvent de l'ancien paradigme : "maître" par rapport à qui ? "victime" par rapport à quoi ? Comme le suggérait Einstein, on ne résout jamais un problème avec le modèle qui en est la cause.

Les catégories anciennes volent donc en éclat. Ce ne sont ni les nostalgies réactionnaires, ni les velléités politiciennes, ni les pleurnicheries victimaires qui nous feront sortir du trou où nous nous enlisons de plus en plus vite.

Comme je l'ai déjà souvent montré, l'histoire courte est faite de cycles de onze années (1918, 1929, 1940, 1951, 1962, 1973, 1984, 1995, 2006, 2017, …). Ils se structurent en successions de trois (le premier génial, le deuxième délirant et le troisième catastrophique). Un nouveau cycle a donc commencé en 2017. Ce cycle est censé être génial (et il est vrai que les innovations champignonnent) … Mais je crains qu'il ne soit aussi un cycle de ressentiment profond, au plein sens de Nietzsche.

Oui, partout (des "populistes" et des "eurosceptiques" aux "gilets jaunes" en passant par les "rétros"), on sent sourdre le nauséabond ressentiment de tous ces médiocres qui ont pris conscience de leur impéritie et qui en accusent les autres. Pourtant, l'évidence est là : personne d'autre que soi n'est responsable de sa propre insuffisance.

Cette vague de ressentiment est dangereuse tant elle est porteuse de populisme et puante de guerre civile. Mais comment la juguler dès lors que son origine n'est que l'intuitif constat, fait par la masse, de son incapacité à comprendre et à adopter le nouveau paradigme qui vient ; bref de son refus de l'émergence en cours ?

Cette émergence est pourtant la seule alternative à la mort de l'humanité.

Or, une émergence, comme une cristallisation, a besoin de germes locaux pour les accomplir selon des voies inédites. De même, un nouveau paradigme s'édifie par coalescence d'initiatives privées et locales qui ne tiennent aucun compte ni des "maîtres", ni des "victimes", ni des nostalgiques, ni des révoltés puisqu'elles se placent par-delà ce marais glauque.

Vous voulez contribuer à faire naître un monde nouveau, viable pour vos enfants et petits-enfants, alors prenez vos responsabilités et commencez, dès aujourd'hui, à vivre autrement, hors de l'ancien paradigme, dans la frugalité, dans la réticularité, dans la virtuosité, dans l'intériorité et dans l'immatérialité.

Marc HALEVY, 30/11/2018