Tisserand de la compréhension du devenir
Conférencier, expert et auteur

Morale, moralisme et moraline.

Sortir enfin de la binarité "Bien" et "Mal".

Quand donc sortirons-nous du moralisme ?

Quand donc sortirons-nous de la moraline ?

Quand donc extrairons-nous l'éthique de cette humaine binarité simpliste et puérile entre le "Bien" et le "Mal".

Le "Bien", c'est ce qui fait du bien.

Le "Mal", c'est ce qui fait du mal.

 

Certes, mais faire du bien ou du mal à qui ? A moi, à ceux que j'aime, à l'humanité, aux arbres, aux vivants, à la biosphère, à la planète Terre, au monde entier, à la Nature, etc …

Faire du bien ici, c'est forcément faire du mal là-bas. Rien n'est gratuit dans l'Univers ; c'est une des grandes lois de l'équilibre cosmologique (que la plupart des moralistes refusent obstinément de regarder avec lucidité).

La vie doit tuer pour vivre !

 

Abattre un arbre pour chauffer la chambre de mon enfant malade et mourant, est-ce moral : tuer en arbre pour chauffer un enfant qui meurt ? L'enfant mourant vaut-il mieux ou plus que l'arbre vivant ? Bien sûr, l'exemple est atroce et extrême et, par cela même, peut-être insignifiant, mais il pose la question suprême : à qui/quoi a-t-on le droit de faire du mal pour faire du bien à ce que l'on préfère ? Qui ai-je le droit de préférer au détriment de certains autres ?

Si la réponse est : à rien ni personne, le suicide est la seule issue (car alors, le dilemme du bien ou du mal à faire, disparait).

Si cette réponse et sa conséquence ne sont pas acceptables, alors ?

 

C'est ainsi qu'au-delà de toute morale, se pose la vraie question éthique ! En matière de faire du bien et de faire du mal, qu'est-ce qui est le mieux ?

Les utilitaristes anglo-saxons avaient répondu : le mieux est de faire du bien au plus grand nombre. C'est une réponse, mais elle est purement statistique et élude complètement les questions du mérite et de la préférence.

Je veux donner un million d'euro ; que vaut-il mieux : donner un euro à un million de personnes, ou donner cent mille euros à dix chercheurs talentueux et prometteurs, ou acheter une grande maison pour accueillir des miséreux, ou investir dans une usine qui produira du bon pain vendu à prix coûtant ?

 

La question n'est donc plus de faire du bien ou de faire du mal, mais bien de faire le mieux ; ce n'est plus une question de morale, mais une question d'optimisation (ou, plutôt, c'est cela la morale : choisir la voie de l'action non pas "bonne" ou "mauvaise", mais la voie optimale).

La question est divinement posée, mais sa réponse est diablement ardue.

 

Et elle l'est d'autant plus que toute action a des conséquences immédiates plus ou moins visibles ou prévisibles, mais aussi une infinité de conséquences lointaines, inconnues et imprévisibles, parmi lesquelles peuvent se cacher des catastrophes.

Faire du bien à court terme, c'est aussi parfois (et même souvent) faire du mal à long terme. Et, répétons-le, ce mal à long terme est le plus souvent imprévisible.

Et, en tout cela, le symétrique est également vrai : faire du mal à court terme, c'est aussi, peut-être, faire du bien à long terme ! Alors ?

 

A ce stade, il est impératif d'éliminer, une bonne fois pour toutes, les notions naïves de morale, de morale absolue ou naturelle, de moralisme, de justice (qu'est-ce qui est juste ? ce qui est bien ; mais nul ne sait ce qui est réellement bien …), etc …

L'humain sait (normalement) ce qu'il fait, mais il ignore majoritairement les conséquences bonnes ou mauvaises, immédiates ou lointaines, de ce qu'il fait.

 

Il ne reste alors qu'une seule règle éthique : faire tout son possible pour contribuer, au mieux, à l'accomplissement et au perfectionnement de soi et de l'autour de soi, avec précaution et prudence, au service de la promotion de la Vie et de l'Esprit sous toutes leurs formes.